Succession : tout le monde d’accord ?

Paul est décédé. Il laisse dans la peine une épouse Suzanne et deux enfants communs majeurs, Charles et André. Il a été retrouvé un testament olographe (manuscrit).

Ce testament ne prévoit que l’attribution de l’appartement en ville en faveur de son épouse, du chalet en faveur de Charles et de la maison au bord du lac en faveur d’André. Le chalet et la maison du lac ont été vendus avant son décès. Il n’y a aucune dette. Paul et Suzanne avait signé un contrat de mariage de séparation de biens.

Le testament ne modifie pas la dévolution légale, c’est-à-dire les parts successorales des héritiers définies par le Code civil. Partant, Suzanne a droit à la moitié de la succession et les enfants à un quart chacun.

Toutes les formalités notariales ont été faites (ouverture du testament et inventaire fiscal). La masse successorale, soit la fortune est de quatre millions de francs et elle est composée de l’appartement en ville pour un million de francs, d’un tableau pour un million de francs, d’une collection de timbres pour un million de francs et de liquidités pour un million.

Suzanne est propriétaire par héritage de ses parents de deux millions de liquidités en banque.

Proposition du notaire

Les estimations des biens ayant fait une belle unanimité, le notaire écrit aux héritiers et leur propose de procéder au partage. La proposition est simple, soit l’attribution de l’appartement en ville et des liquidités en faveur de Suzanne, l’attribution du tableau en faveur de Charles et la collection de timbres en faveur d’André.

Pas d’accord

Charles n’accepte pas. Il n’aime pas les timbres. Il veut le tableau. Le notaire propose une autre solution. Mais elle n’emporte pas l’accord d’André qui évoque même sa crainte que l’appartement en ville soit ensuite donné à son frère par leur maman. La famille se déchire.

Que dit la loi à ce stade ?

Suzanne et ses fils forment une communauté héréditaire. Une telle structure légale implique que toutes les décisions soient prises à l’unanimité. Si cela n’est pas possible, tout est bloqué et seul un juge pourra départager les héritiers. Cela suppose que l’un d’entre eux présente une requête dans ce sens. Chaque partie mandatera un avocat pour défendre ses droits. La demande formulée au juge doit être motivée, les faits allégués prouvés, les conclusions chiffrées. Une telle procédure pourrait conduire à la vente de tous les biens à des tiers et la distribution des produits des ventes et des liquidités par moitié en faveur de l’épouse et pour un quart à chacun des enfants. La procédure prendra du temps et engendrera des frais.

Conscients du coût et de l’impact psychologique d’une procédure judiciaire, les héritiers sollicitent une entrevue au notaire. Suzanne veut la paix familiale et tient à rassurer ses enfants. Elle demande donc au notaire de sécuriser les droits futurs de ses fils, et ce en totale équité entre eux.

Solution

Par convention de partage rédigée par le notaire, les héritiers sont unanimes pour attribuer la propriété de l’appartement en ville, la propriété du tableau de maître et de la collection de timbres en faveur de Suzanne et la moitié du million de liquidités à chaque fils. Suzanne verse à chacun de ses fils la somme de cinq cents mille francs provenant de sa propre fortune. Les héritiers décident de signer, en même temps que la convention, un pacte successoral qui règle les modalités de la succession de Suzanne et qui garantit à Charles et à André une égalité parfaite. Tout est bien qui finit bien.

Piquerez Manuel

Piquerez Manuel

Notaire et avocat chez Etude Piquerez (JU-EN-2)

Ce qu’il faut retenir

  • Un testament peut être modifié ou annulé en tout temps.

  • L’unanimité est la règle dans toutes les successions, à défaut le juge décide.

  • Les conseils du notaire sont essentiels pour faciliter une succession.

Publié dans le magazine générations par les notaires de swisNot